COURS À DISTANCE
Thème IV – « La Chine : des recompositions spatiales multiples. »
Question 10 « Développement et inégalités socio-spatiales en Chine. »
(11) Développement économique et accroissement des inégalités socio-spatiales en Chine aujourd’hui.
Dossier
« La Chine, quelles recompositions spatiales ? »
Mettre des cartes en relation
Montrez quels sont les grands traits de l’organisation du territoire chinois. Quelle recomposition spatiale les « nouvelles routes de la soie » peuvent-elles entraîner ?
Le développement économique de la République Populaire de Chine (RPC), qui s’est considérablement accéléré depuis l’ouverture initiée par la politique des « Quatre modernisations » (1978-1979) de DENG Xioping, a renforcé les inégalités spatiales et le déséquilibre territorial au profit des régions littorales. Comment le territoire chinois s’organise-t-il à l’heure où le projet géopolitique des « nouvelles routes de la soie » entraîne de nouvelles recompositions territoriales ?
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La population chinoise se concentre sur les littoraux et le long des grandes vallées fluviales du Huang He et du Yangzi. Des mégalopoles comme Shanghai (Plus de 20 millions d’habitants dans la métropole, plus de 100 dans l’aire urbaine), Guangzhou (Plus de 10 millions d’habitants), Pékin (Plus de 20 millions d’habitants) structurent cet espace oriental. Les densités humaines moyennes dans l’Est de la Chine sont supérieures à 200 habitants / km², mais plus de 400 autour des grandes conurbations comme Chengdu-Chongqing, ou Guangzhou-Hong Kong-Shenzhen, avec des pics localisés à plus 1 000 hab. /km² dans des centres industriels notamment entre Beijing et Nanjing. L’occupation humaine est ancienne dans cette plaine de Chine située entre le Huang He et le Yangzi : c’est la célèbre plaine de lœss qui fut le berceau historique des premières civilisations Han. C’est aujourd’hui la région la plus riche de Chine, le PIB/hab./an dépasse les 70 000 yuans, contre 45 000 pour les provinces intérieures, voire 40 000 pour le Grand Ouest périphérique chinois (Tibet, Xinjiang). Les régions du Nord (Gansu, Mongolie intérieure), l’Ouest (Qinghai, Xinjiang, Tibet) sont des régions à fortes contraintes géophysiques et politiques : les hauts plateaux et les sommets himalayens du Tibet, le désert du Takla-Makan du Xinjiang, le désert de Gobi de Mongolie intérieur sont des espaces à faibles densités humaines. Mais les raisons de ce contraste entre l’Ouest et l’Est de la Chine sont aussi politiques : peuplées de populations non-han comme les populations turco-mongoles (Ouïghours du Xinjiang, Mongols) ou tibétaines, en position frontalière, ces régions sont l’objet d’une surveillance politique sévère, de répression fréquente et ont été, sous l’ère MAO, l’objet d’une paupérisation orchestrée par le pouvoir central.
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La mise en place du « socialisme de marché » au début des années 1980’ qui fait de la Chine « l’Atelier du monde » renforce les déséquilibres spatiaux. Les Zones Économiques Spéciales (ZES), dont Shenzhen qui fut une des premières par exemple, accueillent les investissements étrangers et sont toutes situées sur la façade littorale. Le développement économique attire une population jeune, nombreuse, parfois illégale (Les Mingongs), qui accentue les déséquilibres nés des contraintes géophysiques et des choix politiques. Les conséquences en termes sociaux sont lourdes : si le niveau et les conditions de vie dans les grandes métropoles du littoral sont équivalentes à celle de l’Union Européenne (PIB/hab./an supérieur à 15 000 US$), les inégalités sociales sont fortes. Les salaires des travailleurs sont faibles (Entre 75 et 300 US$/mois) pour les ouvriers. La crise du Coronavirus partie du centre industriel automobile de Wuhan a montré le visage ultralibéral d’une économie capable de mettre au chômage sans indemnité des centaines de millions de travailleurs dont les usines avaient fermé. Pour les autres, dormir à l’usine était la seule solution pour continuer à travailler… La corruption généralisée qui gangrène le système économique et politique chinois explique aussi les atteintes récurrentes à l’environnement : les eaux des Zones Industrialo-portuaires (ZIP) comme Shanghai (La Gateaway de la Chine) sont polluées, l’air est saturé de pollution aux particules fines. Quand l’OMS déclare un seuil de dangerosité à 35 microparticules /micromètre3, les seuils dépassent les 180 entre Tianjin et Nanjing. Toutes les grandes agglomérations de l’Est chinois sont considérées comme très polluées. Le mépris des autorités politiques et économiques pour les questions environnementales ne s’estompe que lors des grandes campagnes des purges à l’intérieur du Parti Communiste Chinois (PCC) qui permettent aux dirigeants de Pékin de se débarrasser des rivaux aux échelles régionales et locales.
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De nouvelles logiques sont cependant à l’œuvre pour rééquilibrer le territoire chinois. Depuis 2013, le gouvernement a progressivement développé le concept géopolitique des « nouvelles routes de la soie ». Ce cordon de ports et de ZIP sous capitaux chinois (Dans l’Océan Indien) et d’infrastructures ferroviaires de Lignes à Grande Vitesse (LGV), comme la LGV transcontinentale Duisbourg-Chongqing (14 000 kilomètres pour un trajet en moins de 18 heures) doit permettre de sécuriser les voie d’approvisionnement en matières premières de l’énorme appétit de l’industrie chinoise, mais aussi fluidifier les voies d’exportation vers les marchés les plus rémunérateurs (Comme les zones de libre échange que sont l’Union Européenne ou l’ALENA), voire conquérir de nouveaux marchés comme en Amérique du Sud. En parallèle, les « nouvelles routes de la soie » permettent aussi de raffermir les voies d’accès aux pays ateliers dans lesquels la Chine délocalise : Cambodge, Bengladesh, Sri Lanka… En conséquence, le pouvoir central chinois a soutenu la croissance industrielle par d’énormes commandes publiques : les LGV sont à la fois une vitrine du savoir-faire chinois, un moyen d’arrimer l’économie chinoise aux marchés mondiaux, et un moyen de rééquilibrer le territoire. Chengdu, la capitale du Sichuan, est à moins de 6 heures de Pékin : elle en est pourtant distante de plus de 1 500 kilomètres. Les liaisons intérieures sont aussi dopées par ce gigantesque projet de construction d’infrastructures ferroviaires : Xi’an, la capitale du Shaanxi, est depuis 2017 à moins de 3 heures de Chengdu, la capitale du Sichuan contre 16 heures auparavant. La crise de 2008-2009 (Subprimes et crise des dettes souveraines) a entraîné un fort ralentissement de la croissance chinoise, passée pour la première fois en dix ans sous la barre des 10% de croissance du Produit Intérieur Brut (PIB). Les commandes d’État ont permis de soutenir la croissance, d’arrimer les « villes relais » (Ürümqi dans le Xinjiang, Chengdu dans le Sichuan, Harbin dans le Heilongjiang) au dynamisme économique du littoral. Les investisseurs étrangers trouvent là leur intérêt car les LGV ouvrent de nouveaux bassins de consommateurs et de producteurs, les ouvriers du littoral devenant moins compétitifs. Le rééquilibrage sert aussi des intérêts de politique intérieure : les populations des marges sont ainsi mieux intégrées à la Chine des Hans, mieux surveillées aussi grâce aux nouvelles voies d’accès.
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Les « nouvelles routes de la soie » permettent de placer Pékin au centre d’un ensemble d’infrastructures de transport plus ou moins modernes : outil de communication et de puissance, ce concept permet aussi un rééquilibrage du territoire en intégrant les régions du centre et de l’Ouest au dynamisme économique du littoral.
© Souleymane ALI YÉRO, Erwan BERTHO & Ronan KOSSOU (2020)
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