COMPOSITION
Mobilités, flux et réseaux de communication dans la mondialisation.
À partir de l’étude de cas menée en classe, vous montrerez comment les réseaux de transport et de communication structurent les territoires et assurent une inégale intégration des territoires à la mondialisation.
La mondialisation libérale a brutalement mis en concurrence les espaces productifs (Les espaces sur lesquels se réalise l’essentiel de la création de richesses). Les mobilités, élément central du processus de mondialisation, sont également au cœur des questions urbaines et sociales et ce à toutes les échelles. Nous verrons, à l’aide de l’ étude de cas de Roissy et à l’échelle du territoire français et européen, dans quelles mesures les réseaux de transport (Infrastructures de transports physiques de biens et de personnes) et de communication (Numérique) exercent un double rôle : ils organisent le territoire (Et sont par là déterminants dans l’aménagement des territoires) et ils assurent l’ouverture sur le Reste Du Monde, décidant alors de l’inégal dynamisme économique et culturel des territoires desservis ou enclavés.
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Le complexe de Roissy est composé d’un aéroport international (Roissy-Paris-Charles de Gaulle, CDG), d’un vaste espace d’infrastructures de services et d’infrastructures de transports et d’un ensemble de pôles d’activités (Hôtels, Zone d’Activités Commerciales ZAC de Paris-Nord et le Centre des expositions de Paris-Nord Villepinte). L’aéroport international de Roissy-Charles de Gaulle (CDG), plateforme multimodale et hub international, est le plus important aéroport français et la vitrine du savoir-faire français dans le domaine du transport aérien international. Avec près de 60 millions de passagers par an Roissy-Charles de Gaulle est le 6e aéroport mondial (Loin derrière Atlanta 88 millions de passagers mais proche de Londres-Heathrow et ses 66 millions) et le 5e en terme de fret (2 millions de tonnes de fret débardées). Décidé en 1958 mais ouvert seulement en 1970 (Terminal 1) Roissy-Charles de Gaulle est d’abord une plate-forme multimodale (Lieu sur lequel une marchandise ou un voyageur va changer aisément de moyen de transport) qui s’étend sur plus de 3,000 hectares. Le réseau de transport terrestre est dense et varié : autoroutes (L’autoroute A1 qui relie le quart Nord-est de la France et l’Europe du Nord), ligne TGV (Depuis 1994) avec la construction, dans l’aérogare 2, d’une gare de 75 hectares, une des plus vastes infrastructures connectant trains et avions jamais construite au monde. Le réseau de transport relie Roissy-Charles de Gaulle avec Paris et sa région (Par le RER) assurant une connexion avec le réseau de la Régie Autonome des Transports Parisiens (RATP) mais aussi le reste de l’Europe (TGV Thalys vers la Belgique et les Pays-Bas). Les infrastructures se sont étendues : il ne reste plus que 136 hectares à lotir et à construire (Soit 4% du total). 9 Terminaux passagers, 4 pistes gros porteurs ouvertes aujourd’hui aux « supers gros-porteurs » (Comme l’Airbus A380 et le Dreamliner de Boeing) permettent un intense trafic aérien et expliquent que le groupe Air France ait décidé d’y installer l’essentiel de ses services et une partie (technique) de son siège social. Un ensemble d’hôtels, situé près des aérogares, complète le dispositif d’accueil des voyageurs. L’extension des infrastructures et la multiplication des aérogares et des terminaux (1989 ouverture des terminaux 2, 1993 ouverture du T9 pour les vols charters, 2008 ouverture du Terminal 2G dédié aux vols régionaux et lancement du satellite S4 certifié Haute Qualité Environnementale, HQE) imposent la densification des infrastructures de transports intérieures à l’aéroport : en 1994, par exemple, CDG met en service le « CDG-Val de Marne », métro automatique reliant les terminaux 1 et 2. Trains, voitures, camions, avions longs et moyens courriers, RER… L’aéroport Roissy-Charles de Gaulle est bien une plateforme multimodale. Elle connecte des territoires proches (Paris) ou très lointains (Shanghai) mais sa connexion avec l’environnement local est nulle : les axes de transport relient CDG avec les espaces productifs (L’Île-de-France, Paris) et délaissent les communes voisines (C’est ce qu’on nomme « l’effet tunnel »). En ce sens Roissy-CDG est bien un élément des « villes-mondiales » qui vivent comme en apesanteur sur les territoires proches. Mais Roissy-Charles de Gaulle est surtout un hub mondial c’est-à-dire qu’il collecte et redistribue les flux aériens des échelles nationales et locales aux échelles continentales et mondiales. Cette conception du transport aérien vient des États-Unis (Hub and Spokes veut dire « moyeux de roue et rayons », donc une organisation très polarisée) et permet des économies d’échelle en assurant un remplissage maximum des avions et en diminuant les lignes directes. 50% du trafic passager de Roissy CDG est assuré par des correspondances. Cela permet à Roissy-Charles de Gaulle de desservir 300 villes à raison de 30,000 correspondances entre longs et moyens courriers chaque semaine et 500,000 vols par an. Aéroport de Paris (ADP) est l’entreprise qui gère l’aéroport et ses dépendances immédiates : elle favorise le développement de CDG pour en faire la porte d’entrée continentale (Gateway) en Europe. Pour cela elle aménage l’aéroport pour développer ses structures d’accueil et d’attente (300 boutiques, bars et restaurants et près de 30,000 places de stationnement). ADP favorise également le développement du pôle commercial : FedEx (Fret léger et poste aérienne rapide) a fait de CDG son hub européen. Aujourd’hui 8700 entreprises travaillent dans l’enceinte de l’aéroport et 8,500 autres sont installées dans un rayon d’un quart d’heure de CDG. C’est aujourd’hui le 1er créateur d’emplois en Île-de-France (Avec une croissance des emplois de 6%/an en moyenne). ADP, en partenariat avec les collectivités territoriales (Région Île-de-France, Conseil général de Seine-Saint-Denis et de Seine-et-Marne et du Val-d’Oise, Ville de Paris), les organisations patronales (MEDEF, Mouvement des Entreprises De France et les Chambres de Commerce) et l’État, mène une politique de marketing international (Hubstar Paris®) afin d’attirer investisseurs et entreprises. Mais le développement de ce complexe ce fait au détriment des populations locales pour qui paradoxalement l’accès physique à l’aéroport est difficile (A1 saturée, RER peu performant, desserte locale quasi nulle) et qui subissent les nuisances (bruit et pollution). Dans son Rapport environnement et responsabilité sociétale 2009, (ADP, 2009) promet à l’horizon 2013 d’interdire les avions les plus bruyants entre 22 heures et 6 heures et de relever l’altitude d’approche de 300 mètres. Entre autres. Encore une fois c’est la dimension environnementale plutôt que sociale qui prime dans les démarches de développement durable…
Le développement spectaculaire et encore en cours de Roissy témoigne du développement des réseaux de transport et des mobilités en France et en Europe, phénomène manifeste et continu depuis ses 30 dernières années au moins. Les mobilités augmentent. L’étalement urbain, le développement du périurbain et de sa culture de l’entre-soi, la gentryfication des métropoles expliquent l’essor des mobilités dites pendulaires (Travail-domicile). La mobilité est érigée en valeur sociétale : savoir se déplacer, être flexible, profiter des vacances pour voyager sont autant le résultat d’évolutions économiques (Abaissement du coût du transport aérien) que juridiques (Dérèglementation des transports) et idéologiques (Savoir voyager pour trouver un meilleur emploi avec un salaire plus élevé, se déplacer pour ses loisirs ou ses achats). La route (1,000,000 de km de routes en France dont 11,000 d’autoroutes) reste encore le moyen de transport le plus utilisé (83% du trafic voyageur et du trafic marchandises). Il y a en France en 2009 plus de 31,000,000 de véhicules particuliers ! Pourtant la France est leader dans le domaine du transport ferroviaire (10% du trafic de marchandises) avec des produits mondialement connus (Train à Grande Vitesse, TGV, marque de la SNCF et de RFF). Près de 2,000 km de Lignes à Grande Vitesse (Plus de 200km/h, LGV) sont déjà construites. La concurrence est rude en Europe pour capter les flux de voyageurs et de marchandises. Pour relier la Méditerranée à la Mer du Nord la concurrence avec les ports de Gênes et le bassin industriel de Milan et de Turin puis les voies alpines (Suisse et Allemagne) est très forte. Marseille (1er port français avec près de 86 millions de tonnes de marchandises transbordées) reste la porte d’entrée européenne des hydrocarbures (Terminal pétrolier de Fos-sur-Mer) mais son terminal de conteneurs est dépassé par ceux de Gênes (Italie) et de Barcelone (Catalogne, Espagne). La concurrence très rude entre portes d’entrée européenne et entreprises de transport à l’échelle mondiale impose souvent des concentrations (Air France-KLM, déjà le fruit d’une fusion, entre dans le capital d’Alitalia la compagnie italienne historique) et des coopérations transfrontalières (Duo Schiphol-Amsterdam aux Pays-Bas et Paris-Roissy-Charles de Gaulle). Mais l’enjeu majeur reste celui de l’abaissement des coûts du transport. Les Compagnies Low Cost (Comme Ryannair) ont su profiter des subventions européennes et nationales pour s’implanter dans des aéroports de province, ce qui a dynamisé des régions enclavées tout en permettant à ces compagnies de proposer des tarifs sans comparaison possible. La concurrence est encore plus cruelle dans le domaine de la téléphonie mobile et de l’Internet : la bataille entre Free et les majors français du secteur (Bouygues Télécom, Orange et SFR) montre l’âpreté des luttes tarifaires. À la clé le monopole de fait dans des secteurs clés du transport des passagers, de marchandises ou de l’information. L’intermodalité (Ensemble des possibilités de passage d’un mode de transport à un autre avec un minimum de désagréments et de perte de temps) est la clé de la croissance des Gateways françaises. Ainsi la plate-forme du Boulou à Perpignan (Ligne Perpignan-Bettembourg) permet l’interconnexion entre la route (Autoroute A9) et la voie ferrée (Euroterminal) qui permet le chargement direct des camions sur les wagons (Ferroutage). C’est le cas à Lille (Nord) où les autoroutes rejoignent les LGV françaises et les TGV Thalys et Eurostar (Destinations vers les Pays-Bas et la Grande-Bretagne). La gestion des transports en France a suivi évidemment les règles libérales et les pentes de la décentralisation : les collectivités territoriales, les opérateurs privés ou semi-privés et les entreprises étrangères sont de plus en plus sollicités dans les Partenariats Publics Privés (PPP). Les trains allemands empruntent déjà une partie du réseau français. Mais les lois du marché qui guident aujourd’hui les plans d’aménagement des réseaux laissent enclavées les régions les moins productives et renforcent la métropolisation : 15% des ruraux n’ont pas accès à l’Internet haut débit (ADSL), là se situe la vraie fracture numérique. Le réseau ferré français (10% du trafic mais seulement 2% de la consommation d’énergie) et les voies d’eau restent insuffisamment connectés au réseau européen. Le Canal Seine-Nord Europe (Qui permettra le passage de convois de 4,400 tonnes) doit en partie remédier à ces ruptures, mais le canal Rhin-Rhône longtemps attendu reste à l’état de projet. Le « tout routier » de la France a un bilan environnemental lourd : grignotage et mitage de l’espace (Champs, forêts), pollution de l’air et pollution sonore… Le Grenelle de l’Environnement a tenté de trouver des solutions en privilégiant les « circulations douces » (Tramway, métros automatiques…) mais les tendances lourdes et coûteuses en énergies se feront sentir encore longtemps.
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Les réseaux de transport et de communication contribuent à l’insertion de la France en Europe et dans la mondialisation. Ils témoignent par leur architecture des impératifs du marché dans l’aménagement des territoires.
© Erwan BERTHO (2014, révision 2017)
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COMPOSITION corrigée 6 Mobilités, flux et réseaux de communication dans la mondialisation
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