CINÉMATHÈQUE VIRTUELLE – FICHES DE VISIONNAGE
Stanley KUBRICK, Full Metal Jacket. , États-Unis, 1987
« Un monde merdique. »
FICHE TECHNIQUE
KUBRICK (Stanley), Full Metal Jacket, 1987, États-Unis d’Amérique, 116 minutes, scenario de Michael HERR et Gustav HASFORD, avec Matthew MODINE (Engagé Guignol), Vincent d’ONOFRIO (Engagé Baleine), Arliss HOWARD (Engagé Cowboy) et NGOC Le (Sniper Viet Cong), produit par la Warner Bros Pictures.
LE RÉALISATEUR
Quand Stanley KUBRICK réalise Full Metal Jacket (1986), il est déjà un auteur accompli et respecté : Les sentiers de la gloire (1957), Spartacus (1960, 4 Oscars), Docteur Folamour (1964, BAFTA du meilleur film), 2001 l’odyssée de l’espace (1968, 1 Oscar), Orange Mécanique (1971), Barry Lyndon (1975, 4 Oscars), et Shinning (1980) lui ont donné la stature d’un auteur exigeant et perfectionniste, réalisateur de films très sombres et très critiques sur la société américaine, mais mettant volontiers en scène des antihéros asociaux ou marginaux.
SYNOPSIS
Le film comporte deux parties majeures : la première montre l’entraînement d’une promotion de avant leur départ pour le Vietnam, l’autre les combats au Vietnam pendant l’offensive vietminh de la fête du Têt en 1968. L’entraînement est dominé par la personnalité brutale du sergent instructeur HARTMAN qui humilie l’engagé Baleine. Celui-ci, bouc-émissaire de la section, devient un tireur d’élite émérite, puis, dans un accès de folie, tue le sergent instructeur qui l’avait harcelé. L’engagé Guignol, devenu journaliste militaire, retrouve ses amis du camp d’entraînement alors que le Nord-Vietnam lance une gigantesque offensive contre les Américains : les uns après les autres les amis de Guignol sont tués.
ANALYSE
Une partie de l’originalité du film de Stanley KUBRICK vient de son refus de traiter, comme l’avaient fait les précédents films sur la guerre du Vietnam, du caractère inique de la guerre (Platoon en 1986, Le merdier en 1974), de la folie des combattants (Voyage vers l’Enfer, de Michael CIMINO, 1978 ; ou Apocalypse Now, 1979) ou de l’impossible réinsertion des vétérans (Rambo, de Ted KOTCHEFF, 1982). Retrouvant les accents de Docteur Folamour, KUBRICK signe un film cynique et ironique sur la guerre du Vietnam, s’éloignant des axes très moralisateurs et didactiques choisis par ses prédécesseurs (Francis FORD COPPOLA, Oliver STONE). Ses personnages sont désabusés et sans illusion, mais combattent l’ennemi sans faillir et sans pitié. Le réalisateur les filme monnayant les services de prostituées, insultants les cadavres des soldats vietnamiens tués, souvent roublards et critiques vis-à-vis de leur propre hiérarchie. Ils transgressent allègrement toutes les règles de conduites morales apprises au pays sans acquérir une quelconque forme de conscience politique pour autant. En retour la hiérarchie militaire est incapable de se mettre à la hauteur des événements : le danger de l’offensive vietminh est nié alors qu’elle est imminente, les officiers supérieurs sont incapables de comprendre cette jeunesse qui se bat et qui ne partage plus leurs valeurs patriarcales et leur caricature de patriotisme. Le film montre aussi la fin de l’innocence d’une génération confrontée à la guerre et à sa brutalité. KUBRICK refuse de faire des Américains les méchants de l’histoire contrairement à Apocalypse Now et Platoon : ici la guerre oppose les héros à un ennemi insaisissable et que l’on voit peu mais qui n’en n’est pas moins incontestablement le Vietminh. La charge transgressive du film ne vient pas d’une brutale confrontation entre les idéaux d’une jeunesse et la réalité de la guerre, mais vient du comportement de cette jeunesse face aux horreurs de la guerre. Et KUBRICK filme une jeune génération qui compte bien profiter de la guerre autant qu’elle peut, comme elle en subit les conséquences sans illusion. KUBRICK met en scène également les médias, en faisant de son héros, l’engagé Guignol, un journaliste du magazine militaire Stars and Stripes, en filmant des journalistes télé en train de filmer les jeunes recrues au repos alors que la bande son rock couvre les tirs des chars de combat. Les références explicites à John WAYNE (Auteur du premier film grand public sur le Vietnam, Les bérets verts, 1968) qui valent au jeune James T. DAVIS son surnom de Guignol et qui sont ensuite reprise par toute la section, sont autant un élément de cette mise en abîme qu’une moquerie à l’égard de la société américaine aveuglée par sa conception dépassée du monde. Dans un certain sens, Full Metal Jacket ne prétend pas écrire une allégorie de ce que fut le Vietnam (Apocalypse Now), ni dénoncer les ravages de la guerre (Voyage vers l’Enfer), mais filmer au plus près ce que la guerre fut dans toute sa navrante médiocrité.
© Erwan BERTHO (2017)
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KUBRICK Full Metal Jacket (1987)
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